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Compte rendu de la Conférence OHADA/RDC à Louvain La Neuve le 21 mai 2010

  • 15/06/2010
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Entrée de la RD Congo dans l'OHADA : opportunité de réflexions sur le droit bancaire, le droit des sociétés et les intégrations régionales Journée d'Etudes, Louvain-la-Neuve, 21 mai 2010 CONTEXTE 1. Organisé par le Groupe de réflexion sur l'économie et le droit dans les Grands Lacs (GRED), la journée d'études, qui se déroulait le 21 mai 2010 à Louvain-la-Neuve, au Centre Placet. Les sujets traités par les orateurs étaient:
  • Le droit OHADA doit-il avoir peur de la SADC ? ou La problématique de l'enchevêtrement des intégrations régionales.
  • Protection de l'épargne et promotion des investissements en RD Congo: leitmotiv pour un acte uniforme en droit bancaire ?
  • L'impact de l'adhésion de la RDC à l'OHADA sur la création des Petites Moyennes Entreprises en RDC : regard critique sur la facilité de constitution, la sécurité et la flexibilité des nouvelles sociétés commerciales prescrites par le droit OHADA et l'impact de celles-ci sur l'entreprenariat.
POINTS FORTS 2. La journée d'études a commencé par une réflexion sur l'intégration régionale. La RD Congo par son adhésion à l'OHADA substitue le droit issu de cette organisation au droit des affaires en vigueur jusqu'à présent. Cependant, l'appartenance de la RD Congo à la SADC, et bientôt à la SACU (Union douanière d'Afrique australe), remet-elle en question la pertinence de l'adhésion du Congo à l'OHADA ? L'orateur, M. Kadima-Nzuji, a répondu par la négative à cette interrogation tout en soulignant sa légitimité. En effet, même si la SADC n'a pas encore commencé à produire du droit des affaires, on pourrait se demander à juste titre ce qui se passerait si elle le faisait. 3. Dans son exposé, le chercheur a développé plusieurs raisons pour lesquelles la SADC aurait intérêt à adhérer à l'OHADA : le marché que représentent les pays OHADA, l'expertise développée, les standards internationaux repris dans l'OHADA, l'effet de certification, … Il en arrive à la conclusion qu'une intégration économique réussie passe par une intégration juridique forte, avec des textes cohérents. 4. Cependant, même si l'OHADA constitue un atout solide pour la SADC, cette interrogation souligne le « spaghetti bowl » dans lequel sont imbriqués les pays africains. Il existe un véritable problème de délimitation de compétences des organisations régionales et de coûts financiers pour les pays appartenant à plusieurs accords régionaux. Dès lors, l'orateur préconise la création d'un observatoire des intégrations régionales, au niveau de l'OHADA, avec des pouvoirs contraignants, ceci afin d'éviter des doublons mais aussi de gaspiller les efforts du régionalisme. 5. Dans son exposé, Me Arnaud Houet avance les raisons qui plaident pour une application effective du droit issu de l'OHADA. Les petites et moyennes entreprises (P.M.E.) constituent le poumon de l'économie d'un pays. Source de dynamisme et de flexibilité, elles jouent un rôle macro-économique de premier plan1. Considérée comme le meilleur baromètre de la santé d'une d'économie, l'activité économique des P.M.E. « contribue de manière significative à la croissance économique et à l'innovation technologique d'un pays »2. 6. Selon les statistiques de la Banque Mondiale, « Doing business 2010 », la République démocratique du Congo (RDC) est classée 182e sur 183 pays analysés et occupe l'avant-dernière place (45e) dans la région Sub-saharienne de l'Afrique. 7. Ce constat alarmant en RDC est du à un environnement administratif, réglementaire et législatif peu équipé, corrompu et trop lourd pour favoriser la création des P.M.E. et encourager l'esprit d'entreprise. En effet, il faut 149 jours et 13 procédures différentes pour créer une P.M.E. à Kinshasa, alors qu'au Burkina Faso, pays membre de l'espace OHADA, 13 jours et 4 procédures suffisent pour constituer une P.M.E. 8. L'OHADA et, plus particulièrement, l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d'intérêt économique offriront ce cadre législatif et administratif incitatif/attractif, transparent et cohérent qui manque aux entrepreneurs congolais et étrangers. 9. L'OHADA apportera à la RDC un droit des sociétés moderne se traduisant en pratique par (i) une facilité de constitution des sociétés : suppression de l'autorisation présidentielle et des sept actionnaires minimum pour la SA, constitution d'une société par une seule personne (SA et SARL unipersonnelle)…etc. ; (ii) une plus grande sécurité juridique : renforcement de la protection des tiers, régime étendu de la responsabilité des dirigeants, contrôle obligatoire, dans certains cas, par des commissaires, sanction de la nullité en cas de méconnaissance des formalités de constitution…etc. ; et (iii) une plus grande flexibilité : appel public à l'épargne, opérations de restructuration possibles (fusion, scission, apports partiels d'actifs, transformation en une autre forme de société…etc.). 10. La première partie de l'intervention de M. Karhahunga, fut dévolue à la présentation du métier de banquier et à la manière dont ce dernier interagit avec son client. Il a ensuite décrit la notion de compte en banque et présenté les avantages indéniables, offert par un tel bien à son titulaire. L'analyse des législations française et belge reconnaissant le droit au compte en banque et organisant un service bancaire de base, fut l'occasion d'y déceler les solutions pouvant être apportées aux principaux problèmes des systèmes bancaires africains. 11. La seconde partie de l'exposé a débuté par la présentation du contrat de dépôt en banque. Elle s'est poursuivie par la description d'un système de garantie des dépôts communautaire et des raisons pour lesquelles il doit être administré par l'OHADA. CE QUI POUVAIT ETRE RETENU 12. Les débats ont été très vifs, voire houleux, et ont porté sur la nécessité d'adhérer à l'OHADA ou à tout autre intégration régionale, la dollarisation de l'économie congolaise et la vétusté du droit des affaires à destination des PME. 13. Sur l'intégration - Beaucoup de participants ont regretté la participation de la RD Congo à plusieurs regroupements régionaux arguant du coût de ces participations et du peu d'effet sur le terrain. En outre, il faudrait que l'Etat congolais soit politiquement stable et que ses frontières soient assurées. D'autres ont ajouté que l'adhésion à l'OHADA ne servait à rien et cela consisterait à adopter une loi qui ne serait pas appliquée. 14. A ces interventions, M. Kadima-Nzuji a répondu que le Congo ne pouvait faire l'économie d'une attitude séquentialiste et qu'à moins de se penser hors du monde, il n'était pas possible d'ignorer les diverses sollicitations extérieures ainsi que les pressions intérieures. Certes la participation à tous ces organismes représente un coût non négligeable, mais les gains retirés notamment en matière de sécurité n'étaient pas négligeable. En outre, il a précisé que, pour une participation efficace à tous ses ensembles régionaux, une politique interne de développement devrait être soutenue par l'Etat congolais. Enfin, il a affirmé que le devoir d'un chercheur n'est pas seulement de constaté mais aussi de proposer des solutions et donc se démarquer d'une attitude passive. 15. Sur la question plus précise de logiques contraires entre l'OHADA et la SADC, l'orateur a bien précisé qu'on se trouvait devant deux logiques d'intégration différentes : juridique pour l'OHADA et économique, sécuritaire,… pour la SADC. Il fallait plus s'atteler à dégager des synergies qu'à voir des failles et que finalement, avec près d'un tiers des pays africains, l'OHADA en proposant des solutions communes à tous les pays attireraient plus d'investissements directs étrangers. Un membre du club OHADA Namur, M. Kabre, a renchéri en disant que l'OHADA insérant de nombreux standards internationaux dans ses Actes uniformes, son insertion dans l'arsenal juridique de nouveaux membres faciliterait leurs relations au niveau international. 16. Banque et RD Congo - Plusieurs personnes dans la salle ont conclu après l'exposé de M. Karhahunga qu'une dollarisation officielle de l'économie congolaise devrait être entérinée. Un des participants, professeur à l'université de Lubumbashi (Congo), a mentionné une étude montrant comment les gens utilisaient de plus en plus le dollar comme valeur refuge. Un autre participant, ayant travaillé à la GECAMINES dans les années 80, a expliqué comment les gens laissaient sans crainte leur argent à la banque et que devant la dépréciation de la monnaie Zaïre, ils ont commencé peu à peu retirer leur salaire pour le changer en dollar et le garder à la maison. Il soulignait ainsi, comme l'avait dit l'orateur plutôt, que la confiance était à la base de l'économie. 17. L'orateur s'y est opposé vigoureusement en démontrant la perte pour l'Etat congolais de sa souveraineté monétaire et symbolique, mais aussi du coût que représentait ce service pour le client privé congolais. A court terme, l'argent de l'épargnant serait sauvé des fluctuations des cours, mais la banque gagnerait sur le long terme en faisant payer plus cher la tenue d'un tel compte. Il a proposé plutôt de redonner confiance aux investisseurs et aux clients des banques en proposant un système de dépôt et de garantie communautaire. 18. PME et RD Congo - Il y a eu peu de questions sur les PME d'un point de vue technique, mais beaucoup sur les apports concrets liés à l'adoption du droit issu de l'OHADA. Me Houet a ainsi répondu à des questions sur la rapidité de constitution d'une société, les innovations liées à l'OHADA en comparaison au droit économique en vigueur actuellement3. CONCLUSION 19. Cette journée d'études a été l'occasion de rencontres enrichissantes et de débats passionnés et passionnants. Nous remercions le Centre Placet, notamment M. Ntububa, M. Theza et Mme Alvarez, pour nous avoir fourni la logistique nécessaire à la tenue de cette journée d'études et de nous avoir permis de nous inscrire dans sa longue tradition de savoir et de multiculturalité. Nos remerciements vont aussi au site OHADA.COM et à l'UNIDA pour les supports pédagogiques qu'ils ont bien voulu nous envoyer. Ces remerciements ne seraient pas complets si nous ne citions pas les professeurs Mancuso, Bakandeja wa Mpungu, Coppens, Remiche, Biyoudi, Matokot, André-Dumont… et nos familles qui nous ont soutenues sans faillir et qui partage avec nous une vérité : « le savoir fait la richesse. Les institutions et la culture en premier, l'argent ensuite ; mais, au tout début et de façon croissante, ce fut le savoir qui fit toute la différence. » (dixit David Landes). Télécharger le discours d'ouverture de la conférence Pour plus d'information vous pouvez contacter : Monsieur Madimba KADIMA-NZUJI Chargé de cours à l'Université Libre Internationale Doctorant en droit à l'Université catholique de Louvain Co-fondateur du Groupe de réflexion sur l'économie et le droit dans les Grands Lacs (GRED) Tél. : 0471 49 38 52 Email : madi_kadima@yahoo.fr
1 - A. COULIBALY, La défaillance des PME belges : analyse des déterminants et modélisation statistique, Louvain-la-Neuve, UCL, 2004, http://edoc.bib.ucl.ac.be:81/ETD-db/collection/available/BelnUcetd-01232004-112350/, (06/02/2009), p. 16. et « Le financement des PME et des entrepreneurs », In Synthèses OCDE, février 2007, p. 1. http://www.oecd.org/dataoecd/40/50/38104127.pdf (2/04/2009). 2 - A. SCHWIENBACHER, « L'equity gap - Un yeti financier ? », L'Expansion Entrepreneuriat, 2008. 3 - La RD Congo doit déposer l'instrument de ratification au Sénégal.

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